Emily st john mandel crédit photo Sarah Schatz

«Il n’est pas difficile de concevoir une contrevie où je serais restée au Canada, où j’aurais continué à danser et, d’une certaine façon, ça semble plus plausible que ma vraie existence, où j’habite dans un autre pays et où j’écris des romans.»

Quatre ans après le saisissant roman post-apocalyptique Station Eleven, L’hôtel de verre permet de plonger de nouveau dans l’univers surréel et doucement inquiétant d’Emily St. John Mandel. L’autrice née en Colombie-Britannique et maintenant établie à Brooklyn a répondu à quelques questions d’(aparté).

Imaginer un monde pandémique dans Station Eleven et y vivre sont deux choses bien différentes. L’année qui vient de s’écouler a-t-elle changé votre perception du sujet ?

La plus grande différence est que, bien que j’avais beaucoup lu sur le sujet, je pensais qu’être en pandémie était un état binaire : soit on est en pandémie, soit on ne l’est pas. Ce qui m’a surprise dans l’expérience réelle est l’entre-deux, l’interlude terrible où le virus s’approche, il est presque là, peut-être qu’il circule déjà parmi nous, mais personne n’en est encore certain. À New York, c’était le mois de février 2020, quand on regardait avec inquiétude les nouvelles en provenance de Chine, mais qu’on serrait encore la main des étrangers et qu’on prenait le métro.

Pourquoi vous êtes-vous intéressée au scandale financier Madoff, la pyramide de Ponzi qui a inspiré une trame narrative importante dans L’hôtel de verre ?

J’aimerais insister sur le fait que tous les personnages de ce livre sont entièrement fictifs, ce qui signifie que ce n’est pas l’histoire de Madoff ni de sa famille, ni des investisseurs. Mais vous avez raison, le crime est plus ou moins le même. J’étais fascinée par l’échelle de la fraude, particulièrement le fait qu’un délit de cette ampleur requiert du personnel.

Quand j’ai appris que six ou sept des employés de Madoff iraient en prison, je me suis questionnée sur la camaraderie qui existe au sein de n’importe quel groupe de gens qui travaillent ensemble au quotidien. Imaginez le degré d’intensité d’une telle camaraderie si on est au bureau pour commettre un crime monumental.

Dans L’hôtel de verre, l’âge adulte semble impliquer de voir des fantômes, ou d’être hanté par les personnes qu’on a perdues, celles qu’on qu’on aurait pu être. Pourquoi cette idée est-elle importante pour vous ?

J’ai toujours été fascinée par le concept de contrevie. Il s’agit d’une existence alternative, c’est-à-dire la vie que vous n’avez pas vécue. Ça peut être, par exemple, une vie où on a choisi d’immigrer au lieu de rester, ou vice versa. Une vie où on aurait épousé une personne différente, ou fréquenté une autre école. Je n’ai aucune formation officielle en littérature. Il n’est pas difficile de concevoir une contrevie où je serais restée au Canada, où j’aurais continué à danser et, d’une certaine façon, ça semble plus plausible que ma vraie existence, où j’habite dans un autre pays et où j’écris des romans.

Deux des personnages de Station Eleven (Miranda et Leon Prevant) apparaissent également dans L’hôtel de verre. Pourquoi les avoir réintroduits ? Est-ce que L’hôtel de verre est en quelque sorte une prélogie à Station Eleven ?

En fait, je vois les deux livres comme occupant des univers parallèles. Ainsi, dans le monde de L’hôtel de verre, la pandémie de Station Eleven n’est pas imminente. J’ai réintroduit ces deux personnages parce que je les aimais beaucoup et que je voulais passer plus de temps avec eux.

Quels éléments vous intéressent lorsque vous plongez dans un livre ? Pourriez-vous nommer quelques livres qui ont eu sur vous un impact important ?

Comme lectrice, mes livres préférés ont un fil narratif fort et mettent l’accent sur le développement des personnages et le style. Trois romans qui m’ont particulièrement influencée sont Await Your Reply (Cette vie ou une autre) par Dan Chaon, Suite française par Irène Némirovsky et A Visit From the Goon Squad (Qu’avons-nous fait de nos rêves ?) par Jennifer Egan.

Vous avez beaucoup de projets en ce moment. Pourriez-vous nous en donner un aperçu ?

Certainement ! Je viens de terminer mon sixième roman, et je prévois que le processus éditorial débutera bientôt. L’hôtel de verre vient de paraître en format poche aux États-Unis, alors je fais beaucoup de promotion pour ce livre, des interviews et événements sur Zoom, ce genre de chose. Je travaille à une adaptation télé de L’hôtel de verre et à une adaptation cinéma de mon premier roman, Dernière nuit à Montréal. Ma stratégie pour passer à travers la pandémie est de rester le plus occupée possible.

Emily ST. JOHN MANDEL

L'hôtel de verre

« Peut-être le roman idéal à emporter dans un abri antiatomique »

The Washington Post

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