Rachel Monnier collectionne les fleurs sauvages et les algues, s’intéresse à leur unicité, leur bourgeonnement et leur flétrissement, cherchant à en capturer l'essence, à magnifier leur nature imparfaite. À partir de numérisations, couche après couche, elle redessine le vivant, manie le clair-obscur, insuffle la lumière et conçoit ainsi, avec minutie et sensibilité, des œuvres poignantes, empreintes de poésie. Sa composition Ombres blanches a été créée spécialement pour la couverture du nouveau roman de Dominique Fortier.

Alto - Sous le nom Raoul & Simone, vous créez des affiches, des agendas et divers produits qui mettent en valeur la beauté des végétaux. D’où vient votre intérêt pour la flore maritime et boréale?

Rachel Monnier - Ayant vécu près de la forêt le plus clair de mon enfance, j’ai depuis toujours été fascinée par les roches et minéraux, la faune et la flore. À 15 ans, je fus contrainte de quitter cet univers. Les années se sont amoncelées. Puis à force de s’alourdir, leurs souvenirs se sont abandonnés aux profondeurs et recouverts d’un épais limon.

L’effervescence des villes nous inhibe d’une absorption excessive de renouveau. L’être humain est si enivré par les vagues de culture et de connaissances qu’il en perd sa conscience dans un remous de contractions.

Vingt ans plus tard, c’est une overdose de blancheur synthétique qui engendra en moi le besoin pressant de fuir pour me reconnaître.

Depuis, je partage ma fascination par la magnification des détails et j’offre à percevoir, contempler et approfondir notre relation avec la biodiversité. Ainsi, mes interprétations se rallient aux propos de Jean Dorst, dans Avant que nature meure, affirmant que «la nature sauvage ne doit pas uniquement être préservée parce qu’elle est la meilleure sauvegarde de l’humanité, mais parce qu’elle est belle.»

Mes œuvres immersives invitent le spectateur dans un univers visant à «émerveiller pour instruire».

Pouvez-vous expliquer brièvement votre technique, la scanographie, et ce que celle-ci a d’intéressant pour créer des images ?

La scanographie me permet d’échantillonner les spécimens recueillis sur les berges du fleuve Saint-Laurent et en forêt boréale. J’ai ainsi pu développer un vaste répertoire numérique de plus de 3500 fleurs et algues qui me servent de base pour concevoir un univers de déclinaisons imaginaires.

Vous n’en êtes pas à votre première couverture – citons notamment celles des romans Le plongeur de Stéphane Larue et Taqawan d’Éric Plamondon. Qu’est-ce qui vous plaît dans le fait de créer le visage d’un livre? Comment abordez-vous ces mandats?

J’ai à mon actif plusieurs dizaines de couvertures dont les mandats différaient énormément. Celles qui me plaisent davantage sont celles où un temps est accordé à saisir l’esprit du livre pour réaliser un visuel qui l’insufflera au lecteur tout en l’attirant vers l’histoire.

Qu’est-ce qui vous a amenée à vous établir à Percé? Qu’est-ce qui vous inspire et vous nourrit en Gaspésie?

Lors d’un périple dans l’est de la province, mon cœur est resté agrippé aux éléments qui font partie de moi. C’est ainsi que je me suis ancrée à Percé, où je me sens pour la première fois depuis très longtemps si près de moi-même. J’y ai implanté mon atelier, devenu laboratoire de création dans lequel j’expérimente et conceptualise des idées, reflets des émotions que me suscite cette nature. Le paysage gaspésien perçu de mes yeux influence beaucoup mon travail. Mais c’est l’âme du paysage qui l’influence davantage. Chaque atmosphère ou conjoncture éphémère d’éléments naturels me transmettent une énergie qui se modèle en poésie imagée.

www.rachelmonnier.ca


Les ombres blanches couverture de Raoul et Simone

Dominique Fortier

Les ombres blanches

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