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Annie Perreault

La femme de Valence - Annie Perreault

Fiche de lecture

Espagne, été 2009. Pour Claire Halde et les siens, cela s’annonçait comme une villégiature tranquille : trois jours à Valence au milieu d’un été sans pluie, un hôtel avec piscine pour fuir la chaleur étouffante.

Mais les voyages ne sont jamais sans histoire et le ciel n’est pas toujours bleu. Voilà qu’une femme en détresse s’avance sur le toit-terrasse du Valencia Palace. Elle confie son sac à Claire. Puis, elle disparaît.

L’escapade cède le pas aux virevoltes de trois destins de femmes marquées par un drame commun. L’une est un fantôme de passage dont le corps fend l’air. L’autre court sans reprendre son souffle sur les traces de sa mère. Et puis il y a Claire, à la dérive dans une mer de brouillard depuis qu’elle a laissé mourir une femme.

Roman de la consolation, hypnotisant entrelacs de chutes horizontales, La femme de Valence confronte avec aplomb et un sens aigu de l’évocation les délicates questions de l’empathie, de l’indifférence et de l’attachement.

 

Faits saillants

  1. Inspiré d'un fait vécu.

  2. Perspective singulière sur les contrecoups d'un événement traumatique.

  3. Trajectoires de deux protagonistes en quête de réponses et de liberté.

  4. Tableaux des paysages urbains et côtiers de Valence, pastiche des guides touristiques.

  5. Mise en valeur de la course à pied.

  6. Avertissements : suicide et idéations suicidaires, automutilation, violence médicale.

Informations pédagogiques

Époque·s

2009, 2015 et 2025

Lieu·x

Valence, Barcelone, Montréal

Thèmes

Trauma, filiation, identité, absence, impuissance, abandon, voyage, dépassement de soi, fuite, liberté, désir, réparation.

Style et construction du récit

Récit s'étalant sur trois décennies; la tragédie survenue à Valence en 2009, le retour de Claire sur les lieux en 2015 et celui de sa fille Laura en 2025.  Trame fracturée portée par une écriture rythmée, précise, près du corps et du souffle. L'histoire de la mère, narrée à la troisième personne, s'organise sous forme d'un guide de voyage tandis que le monologue intérieur de la fille épouse le temps d'un marathon. Toutes deux apprivoisent leurs souvenirs au fil des kilomètres, s'engageant dans leur corps et leurs espaces. Scènes atmosphériques où se glissent des paroles de chansons et des références cinématographiques. En laissant place au non-dit, La femme de Valence invite les lecteurices à suivre l'intrigue malgré ses irrésolutions et à compléter par elleux-même.

Pistes de réflexion

  1. Analyse littéraire : Laura cite ce passage de Nicolas Bouvier : «On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait. » (p. 146) Comment peut on interpréter cette phrase à la lumière des événements du récit (rencontres avec la femme de Valence, avec Manuel, avec soi, avec la course) ?

  2. Lecture comparative : Lire en groupe le poème Le ciel de Valence d'Annie Perreault. Comparer ces deux formes qu'a choisies l'autrice pour traiter d'un même événement. Qu'est-ce que la poésie et la narration permettent ? Quelles sont leurs forces respectives (évocation, précision, immersion)?

  3. Exercice intermédiatique : Un passage du livre décrit l'atmosphère de Valence en convoquant le film Il deserto rosso de Michelangelo Antonioni. (p. 118) Demander aux élèves de sélectionner un extrait du roman et de tisser un lien avec un objet culturel de leur choix (scène de film, tableau, sculpture, chanson).

  4. Création : Reprendre une section du guide de voyage assemblé par l'autrice (ex : «  arts et divertissements  ») pour raconter succinctement un événement personnel ou un fait divers.

En complément

Lectures

Moderato Cantabile et Dix Heures et demie du soir en été, romans de Marguerite Duras

La Mort à Venise, roman de Thomas Mann

Poupée volée, roman d'Elena Ferrante

Les grands espaces, roman d'Annie Perreault

Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, roman de Haruki Murakami

Ariel et Poppies in October, poèmes de Sylvia Plath

Vers d'autres arts

La femme sans tête, film de Lucrecia Martel

Aftersun, film de Charlotte Wells

Force Majeure, film de Ruben Östlund

Voir la liste d'artistes cités par l'autrice dans les remerciements (Kate Bush, Michelangelo Antonioni, Nan Goldin, etc.)

Extraits

  1. Pag 16

    L’histoire de cette femme se raconte par la peau. Dans le tremblement de certaines parties de son anatomie, un récit émerge. Toute la tristesse de cette histoire se révèle sur le front en rides horizontales, puis circonflexes à la naissance des sourcils. La détresse s’écrit aux coins des lèvres, des creux d’amertume, de fines lignes de sécheresse et de soucis.

  2. Page 18

    Et maintenant cette femme au regard boueux qui fait son apparition, qui lui parle dans une langue étrangère qu’elle ne saurait reconnaître. Claire lui répond en espagnol, puis en anglais, mais elle a du mal à la comprendre, sa voix est rauque et pâteuse, confuse.— Can you help me? My bag, take my bag.

  3. Pages 57-58

    Dans son insomnie les deux vacanciers sont toujours allongés dans les chaises longues à l'autre bout de la terrasse. Ils n'ont rien vu de la femme de Valence, ni son sang ni son corps qui s'élance du toit. Ils sont restés exclus de la scène, n'ont pas prêté attention, pense-t-elle, à son faible cri d'horreur. Ils rentreront chez eux tranquilles, sans rien savoir de l'incident, satisfaits de leur séjour en Espagne. Mais pourquoi est-elle venue vers moi? Ces deux-là auraient peut-être su s'occuper d'elle. Et Claire se met enfin à pleurer.

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