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Elsa Pépin

Le fil du vivant - Elsa Pépin

Fiche de lecture

Des pluies diluviennes s’abattent sur le Québec. Arrimée à ses deux jeunes enfants, Iona est déchirée entre un désir maternel de fusion et le besoin de s’évader, entre le monde parfaitement cartographié de Nils, son amoureux, et le souvenir des débordements et des débauches de sa jeunesse.

Bientôt, la réalité la rattrape. Montréal est sur le point d’être inondée et Nils a tout prévu : il emmènera sa famille à l’abri dans le nord, au somptueux manoir de son clan. Avec quelques proches, ils s’installent loin de la civilisation, isolés dans une forêt noyée, en pleine mutation. Au fur et à mesure que les réserves de nourriture diminuent et que la province s’enfonce dans le chaos, la tension monte dans la demeure au luxe désormais obsolète. Ceux qui entendent lutter férocement pour protéger leurs ressources affrontent ceux qui persistent à croire qu’il faut s’accrocher dans un élan solidaire au mince fil du vivant.

Elsa Pépin met en lumière les extrêmes qui gouvernent nos existences et la porosité des frontières que nous croyons pourtant étanches entre l’individu et le monde, entre la soif et la noyade, entre la destruction et la survie.

Faits saillants

  1. Dystopie climatique.

  2. Exploration du rapport au corps dans la maternité, la drogue et la survie.

  3. Exploration des notions de résistance, de résilience et de transformation.

  4. Présente une vision magnifiée de la consommation de drogues

Informations pédagogiques

Époque·s

Futur proche

Lieu·x

Montréal, Rivière-Rouge

Thème·s

La maternité, le rapport au corps et au plaisir, la consommation de drogues et les excès, la crise climatique, la résilience, l’adaptation et la transformation, la lutte pour les ressources et la (sur)vie

Style et construction du récit

Narration intime, à la première personne. Le récit alterne entre le présent, hôte de pluies diluviennes qui menacent la sécurité, le confort et l’équilibre d’un monde qui se rapproche de celui que l’on connait, et les souvenirs de jeunesse de la narratrice, souvenirs de débauches où le corps et l’esprit se dissolvent et s’abandonnent à l’exploration du plaisir. Style à la fois descriptif et charnel.

Pistes de réflexion

  1. La «cli-fi» ou fiction climatique est un sous-genre littéraire qui gagne en popularité. Comparer le livre d’Elsa Pépin avec d’autres romans représentatifs du genre; établir les rapprochements avec le genre postapocalyptique. OU s’initier au sous-genre en écrivant sa propre histoire de déluge.

  2. À partir des extraits suivants, discuter des intentions de l’autrice et de deux approches face à la crise climatique : opposer une résistance, lutter ou faire confiance au chaos, s’adapter.

    « La crise climatique est une autre forme d’expérience de perte de soi, qui oblige à se mettre à l’écoute de la vie, à renouer avec des savoirs précieux qu’on a arrêté de valoriser. À travers l’ouverture du personnage de Iona, j’ai voulu montrer les forces qu’on peut tirer de l’expérience maternelle et de la constante adaptation qui en découle. Ancienne ballerine et pianiste, deux disciplines qui exigent la rigidité et la résistance d’un corps excessivement balisé, elle a dû apprendre à explorer le mouvement sans le carcan, à faire confiance au chaos. » Elsa Pépin, Le Devoir

    «Et si la destruction des forces, l’oubli de soi, ce passage par une certaine anarchie étaient les voies vers un savoir nouveau ou un rapport renouvelé au monde? C’est l’idée que j’ai voulu explorer dans mon roman, à l’heure où tout le monde sonne le glas de notre civilisation, de nos écosystèmes et d’un ordre du monde détraqué.» Elsa Pépin, (aparté)

En complément

LECTURES

Indice des feux, recueil de nouvelles de Antoine Desjardins explorant la relation de l’humanité à un monde en transformation
Pompières et pyromanes, livre de Martine Delvaux où la réflexion écoféministe s’articule autour du feu
Écoanxiété. L’envers d’un déni, essai-reportage de Noémie Larouche analysant l’écoanxiété comme phénomène social affectant tout particulièrement la jeune génération
Les vertus de l’oubli, texte inédit rédigé par l’autrice sur les origines du roman, publié dans (aparté)
Corps, Chloé Savoie-Bernard (dir.), recueil de textes sur l’expérience, l’habitation du corps
Les ombres filantes, roman de Christian Guay-Poliquin sur les liens familiaux et la responsabilité face à un enfant dans un contexte de survie en nature

VERS D’AUTRES ARTS

Drowning world, série de photos de Gideon Mendel
Montage photographique apocalyptique de Jean Aballea
La série «auto-warming», par l’artiste activiste John Douglas
L’œuvre La conscience des limites (Atlas), de Philippe Boissonnet (et autres œuvres)

Extraits

  1. Page 55

    «La mère pourvoit et incarne le devenir. J’ai désormais les yeux rivés devant moi sur ces deux vies à maintenir, mais devant il y a la tempête, la menace imminente d’une fin abrupte, de la disparition de notre espèce. Je n’y crois pas. Voir devant, les deux pieds plantés dans une planète à l’agonie, accablée par le dérèglement du climat et cet interminable déluge, c’est croire à la vie qui a ressuscité même quand les eaux cherchaient à se refermer sur elle. Je ne construirai pas de bateau pour emmener mes enfants loin d’ici. Je vais les accompagner pour apprendre à danser dans la houle.»

  2. Page 177

    «Lentement, j’apprends à m’habituer à toutes les pertes. Imaginer ne plus franchir le seuil de ma maison, ne plus rentrer chez moi. Je n’arrête pas de faire le trajet dans ma tête. Les clés déposées sur le comptoir gris, l’odeur de café, de plante verte et de curcuma incrustée dans ma cuisine. La trace des petits doigts sales des enfants sur les chaises, la table, les murs. La girafe de Joséphine dessinée sur une feuille brune, déchirée en haut et tachée d’huile à gauche, accrochée au frigo. Les yeux noirs de cette girafe, plus personne ne les voit. L’enfilade de chaussures devant la porte, quatre paires de pieds déclinées en dizaines de formes et de couleurs. Notre rangée de souliers est-elle toujours là, témoin de la chorégraphie de nos déplacements, ou dérive-t-elle dans notre rue, avec tout le reste, emportée par la pluie ?»

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